Votre tout-petit, qui se nourrissait jusqu’à présent exclusivement de lait, qu’il soit maternel ou infantile, approche de ses premières cuillères ! Aux alentours de 5 mois, c’est le moment pour lui de goûter aux fruits et aux légumes… mais en purée. Pourtant, il existe une autre méthode de diversification alimentaire, de plus en plus prisée, où bébé déguste ses premiers aliments sous forme solide, oui oui ! La DME, acronyme de Diversification Menée par l’Enfant, s’adapte aux besoins et au rythme alimentaire des petits gourmands à partir de 6 mois. Découvrir les textures, les goûts, apprendre à attraper puis mâchouiller de vrais morceaux de nourriture, voilà l’objectif de cette pratique que nous vous proposons de découvrir ici !
La DME, définition d’un concept inversé !
À partir de 5 mois, des purées lisses. Puis on introduit progressivement des fruits et légumes écrasés, pour passer vers 9 ou 10 mois à la nourriture en morceaux. Voici le schéma classique de la diversification alimentaire. Celui que nous avons quasiment tous connu, pour nous-même comme pour nos enfants. Eh bien la DME, ou diversification menée par l’enfant, propose de commencer par la fin ! De gros morceaux de nourriture sont proposés à l’enfant. Mais attention, pas n’importe comment. En effet, leur taille diminue au fur et à mesure du développement de sa motricité fine et de sa capacité à mâcher et avaler sans risque de fausse route.
Partant du constat que l’on apprend mieux en toute autonomie (et que votre bébé est TOUJOURS intéressé par le contenu de votre assiette !), la DME propose de laisser l’enfant découvrir seul les aliments sous leur forme solide. Évidemment, pas question de l’abandonner dans sa chaise haute, une carotte à la main… Pour franchir cette grande étape avec succès, il est important de respecter quelques règles et principes.
Bien commencer la DME : les principes de base
Même si elle est menée par l’enfant, la diversification alimentaire et le passage direct aux aliments solides nécessitent quelques prérequis pour être sans danger et réussis.
Respecter le rythme de l’enfant
Tout d’abord, il faut que bébé soit prêt à démarrer cette nouvelle aventure gourmande ! Cela suppose que sa motricité lui permette de se tenir correctement assis, le dos bien droit et non penché en avant, histoire d’éviter les risques d’étouffement. Généralement, l’enfant acquiert cette posture aux alentours de 6 mois.
Votre petit doit aussi être capable de saisir des objets et de les porter à sa bouche. Enfin, il doit en manifester l’envie. Certains bébés se moquent royalement de votre quignon de pain ou de ce que vous mangez lorsque vous êtes à table ! D’autres, au contraire, auront très envie d’attraper tout ce qui se trouve dans votre assiette, et de vous imiter en plein repas. C’est le moment idéal pour tenter la DME !
Veiller à la texture et à la taille des aliments
Ensuite, les aliments proposés doivent être d’une texture adaptée : molle, facilement écrasable entre vos doigts, crousti-fondante… Bref, si bébé n’a pas de dents, ce qui est souvent le cas à 6 mois, ses gencives et sa mâchoire doivent suffire à réduire les morceaux de fruits ou légumes en purée (sans votre aide !). Vous pouvez légèrement cuire les fruits durs, par exemple.
La taille des portions proposées est aussi très importante : suffisamment grosse pour ne pas être avalée tout rond. On parle, pour débuter la diversification menée par l’enfant, de morceaux équivalents à la taille du poing fermé de bébé. Vous pouvez aussi couper les fruits et légumes en bâtonnets de 3cm de diamètre et suffisamment longs, en gros cubes. Vous pouvez aussi proposer des fleurettes de brocolis dont le format convient parfaitement aux petites mains de bébé ! Bref, les premiers temps, oubliez les petits pois et les raisins…
Pas de couverts
Enfin, les couverts sont aussi à oublier. Bébé saisit chaque aliment avec les doigts, le porte lui-même à la bouche, goûte, découvre, mâchonne… Un véritable apprentissage qui sollicite tous les sens : le goût évidemment, mais aussi le toucher des différentes textures, l’odorat avec le parfum propre à chaque mets, qui n’est pas mélangé à un autre, la vue de ces différentes formes et couleurs… Et enfin l’ouïe car oui, croquer, mâcher, sucer, ça fait du bruit !
La DME, jamais sans surveillance
Et bien évidemment, la DME se pratique sous la surveillance étroite d’un parent. Si possible sans les frères et sœurs, bien trop intéressants pour que bébé parvienne à se concentrer ! Vous devez être présent pour parer à une éventuelle fausse route, pour rassurer votre tout-petit, lui expliquer quoi faire ou l’inciter à vous imiter. Mais n’intervenez pas, en mettant par exemple vous-même un morceau de nourriture dans la bouche de bébé ! L’apprentissage doit se réaliser en toute autonomie. Si l’aliment croqué est trop gros, bébé possède un super réflexe de type nauséeux qui lui permettra de recracher. Lâchez prise et faites-lui confiance !
L’origine de cette méthode de diversification alimentaire
La diversification menée par l’enfant est loin d’être un nouveau concept parental à la mode. La pratique existe depuis bien longtemps. D’ailleurs, dans de nombreuses cultures, elle est la seule manière (avec l’allaitement) de nourrir les tout-petits. Point de petits pots ni de purées lisses, l’enfant n’a d’autre choix que de découvrir les aliments sous leur forme solide. Et ses capacités lui en laissent d’ailleurs bien la possibilité, dans la préhension des morceaux, la mastication et la déglutition !
L’apport de Gill Rapley
Si la DME existe dans les faits, elle n’avait pas vraiment été théorisée… Jusqu’à ce que Gill Rapley, infirmière, sage-femme et consultante en lactation britannique, s’aperçoive de l’intérêt des bébés pour la nourriture solide avalée par leurs parents plutôt que pour leur propre assiette de bouillie. Grâce à son métier, elle observe progressivement l’évolution de l’alimentation de ces enfants. Elle encourage les parents à prendre en considération les besoins de leurs petits.
La naissance de ses propres enfants achève de forger sa conviction. Abandonnant les recommandations pédiatriques habituelles, elle décide de pratiquer la DME pour son 3è petit. Elle lui fait confiance pour évoluer dans l’alimentation solide à son rythme. Une expérience qu’elle décide finalement de relater dans un ouvrage intitulé « Baby-Led Weaning : helping your baby to love good food » (littéralement : « La DME : aider votre bébé à aimer la bonne nourriture »), paru en 2008. Le système de santé britannique a même recommandé cette méthode qui s’est ainsi développée en Angleterre !
Si ce n’est pas (encore) le cas en France, la diversification menée par l’enfant se démocratise chez les parents. C’est le cas dans les crèches et chez les assistantes maternelles. Le docteur Arnaud Pfersdorff, officiant notamment dans l’émission La Maison des Maternelles et auteur de nombreux ouvrages de santé pédiatrique, prône les mérites de cette nouvelle façon d’aborder la diversification alimentaire chez les enfants. Mais d’ailleurs, ces avantages de la DME, quels sont-ils ?
La DME et ses avantages, vus par les parents
La diversification menée par l’enfant présente de nombreux aspects positifs, pour l’enfant mais aussi pour les parents !
Côté parents, adieu la corvée de préparation de purées en tout genre ! Finies, les séances d’épluchage de légumes, de découpage minutieux puis de cuisson et enfin de mixage consciencieux pour que plus aucun morceau ne subsiste. Et rien que ça, c’est appréciable. Vous allez découper et cuire grossièrement les légumes. Vous proposerez les fruits mûrs tout simplement en morceaux. Un gain de temps, mais aussi d’argent : vous évitez le budget petits pots, sacrément important !
Ensuite, au fur et à mesure de la progression de la DME, bébé va partager vos repas. Proposez-lui de petits cakes salés, des boulettes de riz et jambon, des lanières d’omelette, du poisson, des flans de légumes, de la viande très tendre ou en boulettes…
En pratiquant la DME, vous encouragez également votre enfant à devenir autonome, dans un domaine où il ne l’est pas souvent. Un des fondements de l’éducation, et un bénéfice dont vous profiterez ensuite longtemps !
De plus, la découverte précoce des vrais goûts et des textures diminue la tendance des enfants à la néophobie alimentaire. Vous savez, cette période, aux alentours de 2 ans, où votre petit refuse catégoriquement de manger autre chose que des pâtes et devient « difficile » (ou carrément relou) ?
Enfin, d’un point de vue santé, la diversification menée par l’enfant aurait plusieurs autres impacts positifs. Selon Christine Zalejski, autrice de « Le Grand Livre de la DME » et docteur en biologie, elle influerait positivement sur le développement de la mâchoire et de la dentition. Elle permettrait aussi de limiter le surpoids en favorisant chez l’enfant l’alimentation consciente et le respect de sa propre sensation de satiété. Bref, une belle aventure à tenter, d’autant que de nombreuses crèches suivent des formations en ce sens et peuvent vous soutenir dans la démarche.
Y a-t-il des risques à pratiquer la diversification menée par l’enfant ?
Des risques à proprement parler, il n’en existe pas réellement. La fausse route est généralement empêchée par un réflexe de nausée naturel et puissant. Celui-ci permet à bébé de rejeter un aliment trop gros pour être avalé. Restez tout de même vigilant et surveillez étroitement le repas de votre enfant !
La méthode de la DME présente néanmoins quelques inconvénients à connaître avant de débuter :
- Laisser votre enfant manger tout seul, c’est salissant ! Il va vouloir explorer les aliments. Cela implique qu’il s’en mettre plein les doigts, le visage, les vêtements… et souiller le sol de votre cuisine. Prévoyez un grand bavoir adapté (certains recouvrent même la tablette de la chaise haute), une serpillière, et respirez un grand coup. Ce sera sans doute moins pire qu’une attaque de purée de brocolis !
- Lors des 3 premiers mois d’apprentissage de la nourriture solide, les repas prennent du temps : vous devrez faire preuve de patience. Comptez une bonne trentaine de minutes de disponibilité pour le déjeuner en autonomie de votre enfant !
- Ne soyez pas angoissé à l’idée que votre enfant ne soit pas assez nourri. Les premiers temps, il risque effectivement de ne pas ingérer d’énormes quantités de légumes ni de fruits. Mais faites-lui confiance pour savoir réguler son appétit et compenser de potentielles carences avec l’apport en lait maternel ou infantile. Lorsqu’il progressera, les portions augmenteront et s’équilibreront rapidement.
- Pratiquer la DME, c’est épuisant pour un tout-petit : cela demande beaucoup de concentration et d’énergie, même pour digérer ! Le repas du soir n’est donc pas l’idéal pour commencer la diversification solide. Et si bébé est vraiment affamé et pleure de faim, passez votre tour !
- Certains petits (environ 15 %) n’acceptent pas la méthode de la DME, qui ne leur convient pas. Le fondement même de la diversification menée par l’enfant, c’est le respect de leur rythme et de leurs besoins. Alors soyez à son écoute, c’est l’essentiel.
La Diversification Menée par l’Enfant est une grande et belle aventure familiale. De plus en plus de parents et bébés la tentent. Elle s’inscrit dans cette volonté grandissante d’une éducation bienveillante et attentive aux besoins de ce petit être que l’on a conçu avec tout notre amour… Et vous, quelle est votre expérience de la DME, qu’elle soit bonne ou plus difficile ? Peut-être allez-vous vous lancer dans la découverte des aliments solides avec votre tout-petit d’ici peu ? Venez partager vos histoires et vos questions en commentaires, nous sommes curieux de vous lire !